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samedi 15 juin 2019

HEX - Thomas OLDE HEUVELT




Quatrième de couverture :

Bienvenue à Black Spring, charmante petite ville de la Hudson Valley. Du moins en apparence : Black Spring est hantée par une sorcière, dont les yeux et la bouche sont cousus. Aveugle et réduite au silence, elle rôde dans les rues et entre chez les gens comme bon lui semble, restant parfois au chevet des enfants des nuits entières. Les habitants s’y sont tellement habitués qu’il leur arrive d’oublier sa présence. Ou la menace qu’elle représente. En effet, si la vérité échappe de ses murs, la ville tout entière disparaîtra.

Pour empêcher la malédiction de se propager, les anciens de Black Spring ont utilisé des techniques de pointe pour isoler les lieux. Frustrés par ce confinement permanent, les adolescents locaux décident de braver les règles strictes qu’on leur impose. Ils vont alors plonger leur ville dans un épouvantable cauchemar…




Qu’en penser ?



Ce qui est étonnant avec ce roman, c'est que ça commence à la fois flippant mais aussi bon enfant. D'un côté cette sorcière effroyable, prénommée Katherine, avec ses yeux et sa bouche cousus, dont le murmure vous donne envie de vous suicider, de l'autre le groupe Hex qui surveille la sorcière grâce à son application (et oui en tant qu'habitant de Black Spring, on vous fournit un iphone pour la géolocaliser en temps réel) et invente des faux chantiers de construction et autres repoussoirs rigolos quand des personnes extérieures à la ville veulent acheter une maison dans le coin. (Oui parce qu'une fois qu'on a passé une nuit à Black Spring, on ne peut plus jamais s'en éloigner, sous peine d'avoir des pensées morbides puis suicidaires en quelques jours).


Flippant mais bon enfant comme je le disais. Mettez votre incrédulité au placard et imaginez cette sorcière apparaissant à sa guise dans votre salon par exemple, et sur la tête de laquelle on place un torchon pour pouvoir manger tranquille. On s’habitue à elle, et on découvre ainsi la vie à Black Spring.
Tout semble aller pour le mieux dans cette petite ville, jusqu’à ce qu’une bande d’adolescents lassés des règles établies pour une bonne cohabitation avec Katherine, vont braver les interdits et lui infliger des farces qui tourneront en sévices et persécutions.

Tout du long, la tension monte, monte, monte et les pages se tournent toutes seules et à toute vitesse ! La peur n’est pas très bonne conseillère, ça n’a jamais été aussi vrai et Thomas Olde Heuvelt est décidément un maître ès ambiance pesante et horrifique ! La situation est explosive et le lecteur sent bien qu’une tempête va se déchaîner. On a envie de savoir quel en sera le déclencheur, ce qui va se passer et comment tout ça va se terminer pour Steve et sa famille. Les habitants de Black Spring réussiront-ils à vaincre le Mal ? Le trouveront-ils vraiment là où ils le cherchent ?

Une lecture qui passe toute seule malgré plus de cinq cents pages, une fois plongé dans l’histoire on ne la lâche plus.Si un mot doit représenter ce roman c’est « originalité ». Thomas Olde Heuvelt réussit à donner un coup de jeune au thème de la littérature horrifique grâce à un personnage de sorcière très bien construit, dans un village isolé ou cette entité  prend le rôle d’idole. Les gens vivent avec elle comme si elle faisait partie des meubles.Ce personnage de sorcière est vraiment très bon et fait une grande partie de l’originalité du récit qui dans l’écriture et les descriptions pourrait passer pour un texte de Stephen King, aussi détaillé et avec le génie d’une écriture dynamique et prenante. Les chapitres s’enchaînent sans que le lecteur y fasse attention.« Hex » est un roman que j’ai vraiment apprécié, qui commence calmement mais dont l’action et l’horreur vont évoluer progressivement pour finir en apothéose de l’horreur. Une histoire à recommander à tous les amateurs de frissons.





Thomas Olde Heuvelt est né aux Pays-Bas en 1983. Salué par la critique, Hex est déjà un succès traduit dans quatorze pays, et la Warner développe actuellement une série télévisée basée sur le roman. 


HEX  -  Thomas OLDE HEUVELT

BRAGELONNE  -  20/09/2017

LE LIVRE DE POCHE  -  13/02/2019

vendredi 7 juin 2019

SEUL AVEC LA NUIT - Christian BLANCHARD

Quatrième de couverture :

Que sommes-nous réellement prêts à faire pour sauver nos proches ? 
Cette question, Éric de la Boissière se la pose tous les jours. Sa fille, Élodie, est atteinte d'une grave maladie rénale. Du fait de son groupe sanguin, ses chances de recevoir une greffe sont quasi nulles. Mais avec beaucoup d'argent... Élodie doit pouvoir être soignée, pense Éric. Dirigeant d'un établissement financier, il a entendu parler de réseaux parallèles permettant d'obtenir un organe sain de donneurs volontaires. 

Que sommes-nous prêts à sacrifier pour sauver nos proches ? 
Cette question, Gilles Patrick ne se l'était jamais posée. Mais depuis quelques semaines, ce grand chirurgien ne dort plus. Tandis qu'un revolver est braqué sur la tempe de son épouse et de sa fille, un groupe d'hommes le contraint à pratiquer de lourdes opérations sur de jeunes patients pourtant en pleine santé. 

Les circonstances ont beau être différentes, la raison qui a fait basculer ces deux hommes dans un autre monde est la même. Et si la volonté de sauver un proche n'était pas une raison suffisante ? D'une noirceur abyssale, le nouveau roman de Christian Blanchard explore les âmes compromises et pousse ses personnages, comme le lecteur, dans leurs pires retranchements.  


Qu’en penser ?

Dans son troisième roman paru chez Belfond, Christian Blanchard, comme à son habitude, nous plonge à nouveau dans les tréfonds de l’âme humaine.
Que sommes-nous prêts à faire ou à sacrifier pour sauver nos proches ?
D’entrée de jeu, l’auteur plonge le lecteur au coeur de l’action.
Cette question, c’est d’abord un chirurgien renommé qui se la pose quand sa famille est prise en otage afin de le contraindre à pratiquer des prélèvements d’organes sur de jeunes patients en bonne santé.
Cette question, les époux La Boissière se la posent tous les jours, ou devrais-je dire ne veulent pas se la poser. Leur fille Élodie est atteinte d’une grave maladie rénale. Elle a un besoin urgent d’une greffe rénale, mais il est très difficile de trouver via le circuit normal un donneur compatible. Alors l’argent mis sur la table évite de se poser des questions et résout le problème des états d’âme.

Et puis, il y a Némo, un vieil homme , alcoolique et fumeur invétéré, dont la vie s’est écroulée avec le suicide de sa fille Mélanie à 14 ans. Un jour, il sauve une jeune fille prête à se suicider, et la recueille chez lui. Il la prénomme Muette puisqu’elle ne dit rien. Sur son corps, il observe une longue cicatrice. A défaut d’avoir pu sauver sa fille, qu’est-il encore prêt et capable de faire pour sauver celle-ci ?

Et que dire aussi de ces enfants – Aïcha, Diarra, Sayid, … - victimes d’un monstrueux trafic ? L’auteur nous parle d’une exploitation honteuse des plus démunis. Ces enfants ont vécu des drames et des tortures qui les ont fait cruellement basculer de l’enfance à l’enfer.
Le plus dur est de savoir que ces enfants sont des milliers à travers le monde, des enfants qui n’ont pas demandé à venir au monde, et qui cherchent juste à vivre.
Comme si leur misère ne suffisait pas, comme si leur courage, leur ténacité ne pouvait pas être récompensé, il faut encore qu’ils soient exploités par des bourreaux sans âme.

Christian Blanchard nous parle de ces personnages, tous criant de vérité, qui vont se croiser pour le meilleur et pour le pire. Nous nous y attachons, nous souffrons à leur côté, nous les suivons entre espoirs déçus, rêves et désillusions. Ils vont nous tordre les tripes. Leurs destins brisés nous pinceront le coeur et nous laisseront un goût amer en bouche.

Un roman bien noir, qui nous bouscule, nous dérange, nous questionne.
Une plongée saisissante de plus dans la noirceur de l’âme humaine.




SEUL AVEC LA NUIT  -  Christian BLANCHARD

BELFOND  -  16/05/2019

jeudi 30 mai 2019

LA MER QUI PREND L'HOMME - Christian BLANCHARD



Quatrième de couverture :

Entre la guerre d'Afghanistan et l'atlantique nord, un page-turner qui vous plonge dans la tempête des âmes et une mer rouge sang.
Au large des côtes du Finistère, un chalutier à la dérive est localisé. Lors de l'opération de sauvetage, une femme est retrouvée dans une remise, prostrée, terrorisée et amnésique. Le reste de l'équipage a disparu.
Parmi eux se trouvaient trois anciens militaires français. Xavier Kerlic, Franck Lecostumer et Paul Brive avaient embarqué sur le Doux Frimaire à Concarneau, encadrés par le lieutenant Emily Garcia, des services sociaux de la Défense. Celle-ci devait expérimenter avec eux une méthode de lutte contre le stress post-traumatique en les insérant dans un groupe d'hommes soudés par de rudes conditions de travail – les marins du Doux Frimaire.
" Je ne le sens pas, ce coup. Qu'est-ce qu'on vient faire dans cette galère ? " avait lancé Franck en montant à bord, avant que le chalutier ne lève l'ancre en direction de la mer d'Irlande et ne disparaisse des radars…

Qu’en penser ?

Après mon coup de coeur pour Iboga, je décide de rester dans l’univers de Christian Blanchard, avec son second livre paru chez Belfond, La mer qui prend l’homme.
Il est à noter que ce livre est paru initialement en 2014 aux éditions du Palémon, sous le titre Pulsions salines, et a été finaliste dans le cadre du prix du polar francophone de Cognac 2015.

A nouveau, l’auteur nous emmène faire une plongée saisissante dans l’âme humaine, en traitant un sujet fort : le SPT (Stress Post Traumatique). Toute personne vivant une situation de stress importante (accident , attentat, guerre, …) peut développer un SPT.
Le cerveau atteint par des traumatismes psychiques va reproduire à l’identique des stimulis perçus lors de l’agression. Ces souvenirs constituent des flash-back qui provoquent des cris, des gestes de combat, un réveil en sueur, …

C’est très sombre, ça secoue, et ça, on le comprend dès le départ, dès le moment où on assiste à une opération hélitreuillée en vue du sauvetage d’un chalutier à la dérive, le Doux Frimaire, et à la découverte d’une femme complètement prostrée et terrorisée, de l’absence totale de tout autre membre d’équipage, et d’un véritable capharnaüm à bord : instruments de navigation détruits, commandes des moteurs fracassées, du sang partout …

En commençant pour ainsi dire par le final, Christian Blanchard tient le lecteur en haleine, car on imagine bien qu’on se dirige tout droit vers quelque chose de très moche.
S’ensuit alors un retour dans le passé, où l’on fait connaissance avec les principaux protagonistes : un sergent, un lieutenant, un infirmier et un aumônier, ayant tous participé au conflit afghan, des êtres devenus psychologiquement instables à cause des situations de stress qu’ils ont vécues.

Sous prétexte de réhabilitation, le lieutenant Emily Garcia les rassemble sur un chalutier, parmi un équipage aguerri à la pêche en haute mer. L’objectif est de leur en faire baver, leur faire mal, leur faire vivre les difficultés du métier de marin pêcheur. Ils doivent s’apercevoir que leur problème de stress devient alors secondaire.

L’auteur nous emmène tantôt dans ce conflit afghan, tantôt sur le chalutier, ballottés sur une mer déchaînée, où l’on ressent une violence qui ne demande qu’une étincelle pour exploser.

Seul petit bémol me concernant : les passages parfois sans transition d’un personnage à l’autre, ou d’un endroit à un autre, qui m’ont parfois déstabilisé.
Cela ne m’a pas empêché d’être emporté dans cet univers, embarqué à bord du chalutier, ou projeté durant la guerre en Afghanistan.

La mer qui prend l’homme est un roman qui nous plonge dans la noirceur la plus totale. C’est prenant, intense, angoissant et surtout cruellement et tristement crédible.
L’intrigue vous ronge comme nos héros, la folie l’emporte et le suspense est insoutenable jusqu’au bout.


Après des études de sociologie, Christian Blanchard, d'origine bretonne, a passé vingt-cinq ans au sein d'une institution publique. Il se consacre aujourd'hui à l'écriture.


LA MER QUI PREND L'HOMME  -  Christian BLANCHARD

Editions BELFOND  -  18/10/2018

dimanche 26 mai 2019

IBOGA - Christian BLANCHARD



Présentation de l’éditeur :

28 octobre 1980. Jefferson Petitbois, condamné à la peine de mort, est incarcéré à la maison d’arrêt de Fresnes. Pour rejoindre sa cellule dans le couloir de la mort, il croise la « Louisette ».
Comme un outrage à la dignité humaine, un doigt d’honneur à la vie, la guillotine trône au milieu de la cour.
Accompagné de deux gardiens, il la frôle et sent son odeur de graisse et de limaille.
Dix-sept ans ! Suffisamment grand pour tuer donc assez vieux pour mourir…
 
Deux ans auparavant, Jefferson avait rencontré Max, son protecteur et mentor. Iboga était alors entré en lui. Iboga l’avait rendu plus puissant. Immortel. Meurtrier.
 
Une fois, Max m’a dit quelque chose que j’ai compris plus tard : Si tu commences à mentir, mec, tu seras obligé de le faire tout le temps et tu seras piégé un jour parce qu’il y aura des incohérences, des trucs qui n’iront pas ensemble. En revanche, si tu dis la vérité, tu ne seras jamais mis en défaut.
J’ai dit la vérité aux flics, avocats, juges et jurés. J’ai pris perpète et failli avoir la tête tranchée.
 
Ce livre raconte la vérité… La vérité selon Jefferson Petitbois… Un homme trop jeune pour mourir.

Que penser ?


Après avoir été maintes fois interpellé par l’enthousiasme de certains blogueurs, je me suis finalement laissé tenter par la lecture du livre de Christian Blanchard, Iboga.
Je ne m’étais pas attendu à être à ce point séduit. L’auteur nous raconte l’histoire d’un homme, le dernier ayant bénéficié de la grâce présidentielle avant l’abolition de la peine capitale. Bonheur ou malheur !? On est en droit de s’interroger lorsqu’on sait qu’il va passer sa vie derrière des barreaux. Lorsqu’on est emprisonné à 17 ans, la vie est encore très longue.

Un récit qui, dès les premières pages, va se révéler très prenant. L’auteur démontre tout son art dans le fait qu’il ait réussi à me faire ressentir une profonde empathie pour un homme qui a commis des actes horribles. Attention, ces actes ne sont pas dévoilés d’emblée et c’est, je pense, ce qui a fait que j’ai pu autant m’attacher à Jeff. Parce que je ne connaissais pas encore ses méfaits. Parce qu’on apprend à connaître l’être humain qu’il est à l’instant présent avant de savoir qui il a été. C’est très bien pensé de la part de l’auteur.

Comme le dit si bien Karine Giebel, c’est une véritable "plongée dans l’âme humaine".
Jeff, on va le voir évoluer, on va être avec lui dans sa tête. Lorsqu’il espère, lorsqu’il a de la peine, lorsque ses souvenirs refont surface. C’est avec l’arrivée de la psychologue que le travail sur lui-même, sur son passé, va commencer. Comme une sorte de journal intime, il remplira des cahiers qui lui serviront d’exutoire. Des pages qu’il va noircir avec des mots et des dessins : ses souvenirs.

Ce récit m’a perturbé dans le sens où je ne pensais pouvoir ressentir de tels sentiments pour un homme comme Jeff. Bien que je réprouve les actes commis, je ne peux me défaire de l’idée qu’il a de grosses circonstances atténuantes. Un homme qui aura subi toute sa vie, qui aura toujours été sous la houlette d’une autre personne.

Outre ses actes et son passé, on va aussi vivre avec lui son quotidien en tant que détenu. La haine de certains gardiens à travers des violences physiques mais surtout psychologiques. L’amitié aussi avec Jean, un gardien très droit et d’une bonté extraordinaire qui sera pour lui, jusqu’au bout, d’un énorme soutien. Et puis, l’arrivée de cette petite souris qui m’a fait penser à "La ligne verte".

Jusqu’au bout j’ai été tenu en haleine. On ne sait pas où l’auteur va nous mener. Jusqu’à cette fin particulièrement émouvante. Elle signifie énormément et conclut d’une très belle (même si étrange d’utiliser un tel mot dans de telles circonstances) manière l’histoire.

Tout est parfaitement maîtrisé, les faits amenés avec doigté et la psychologie profonde.



IBOGA  -  Christian BLANCHARD

BELFOND  -  25/01/2018

Format poche : POINTS  -  04/04/2019

vendredi 24 mai 2019

D'UNE MORT LENTE - Emelie SCHEPP



Quatrième de couverture :

Mis en scène dans leur propre appartement, des corps comme des poupées incomplètes, mutilés avec une précision chirurgicale. 
Justement, c’est peut-être la chirurgie qui relie les victimes entre elles. Et, plus précisément, une erreur médicale commise dans le secret d’une salle d’opération, étouffée par les années. 
Des nuits blanches attendent la police de Norrköping et la procureure Jana Berzelius. 
Mais cette dernière a d’autres cauchemars que le tueur au scalpel. 
Un homme qui la connaît depuis l’enfance. Un homme qui pourrait révéler à tous que Jana a été élevée et entraînée pour tuer. Cet homme est sa véritable menace. Et il vient juste de s’échapper. 


Mon avis :

Après Marquée à vie et Sommeil blanc, D’une mort lente est le troisième tome des aventures de la procureure Jana Berzelius, de l’auteure suédoise Emelie Schepp.
Dès le premier tome, je me suis laissé emporté par le style de l’auteure, par la personnalité, le caractère, la détermination de l’héroïne, procureure à Norrköping en Suède. Aussi est-ce avec plaisir que je me replonge dans ce troisième opus.

Cette fois, la section criminelle enquête sur des meurtres particulièrement sanglants qui hantent la ville. Parallèlement à cela, comme dans les précédents livres, Jana Berzelius doit affronter les fantômes de son passé et tenter le tout pour le tout afin que ses terribles secrets ne soient pas dévoilés à la face du monde.

Bien que les livres de cette série puissent être lus indépendamment les uns des autres, je vous conseille vraiment de suivre l’ordre chronologique, afin d’avoir une continuité dans ce fil rouge constitué du passé de Jana Berzelius. Au fil des livres, l’auteure a fait évoluer son personnage principal. On en découvre plus sur son enfance, sur tout ce qui est à l’origine de ses forces et de ses faiblesses.

Les autres protagonistes, membres de la section criminelle, évoluent aussi dans leur quotidien professionnel et leur histoire personnelle. Cela peut toutefois sembler déroutant et amener une certaine lenteur au rythme du livre. Mais rassurez-vous car dès que vous aurez cerné les personnages et vous serez habitué à l’écriture, vous finirez complètement absorbé par l’histoire. Comme tout bon thriller et polar venant du nord, Emelie Schepp a su distiller une atmosphère froide et très particulière à son histoire. L’auteure a aussi le don de faire monter le suspense crescendo et de faire de ses livres de véritables pages-turners.





Née en Suède, à Motala, Emelie Schepp appartient à la nouvelle génération d’écrivains nordiques, celle qui a succédé à des auteurs mondialement connus, comme Stieg Larsson. Après avoir remporté un prix d’Art dramatique et travaillé dans la publicité, Schepp fait des débuts très remarqués avec Marquée à vie, le premier volume de sa série « Jana Berzelius ». Déjà vendue dans 27 pays à ce jour, cette trilogie a conquis 200 000 lecteurs rien qu’en Suède.

D'UNE MORT LENTE  -  Emelie SCHEPP

HARPER COLLINS Noir  -  06 mars 2019

dimanche 5 mai 2019

LES PASSEURS DE LIVRES DE DARAYA - Delphine MINOUI


Présentation de l’éditeur :

De 2012 à 2016, la banlieue rebelle de Daraya a subi un siège implacable imposé par Damas. Quatre années de descente aux enfers, rythmées par les bombardements au baril d'explosifs, les attaques au gaz chimique, la soumission par la faim. Face à la violence du régime de Bachar al-Assad, une quarantaine de jeunes révolutionnaires syriens a fait le pari insolite d'exhumer des milliers d'ouvrages ensevelis sous les ruines pour les rassembler dans une bibliothèque clandestine, calfeutrée dans un sous-sol de la ville.

Leur résistance par les livres est une allégorie : celle du refus absolu de toute forme de domination politique ou religieuse. Elle incarne cette troisième voix, entre Damas et Daech, née des manifestations pacifiques du début du soulèvement anti-Assad de 2011, que la guerre menace aujourd'hui d'étouffer. Ce récit, fruit d'une correspondance menée par Skype entre une journaliste française et ces activistes insoumis, est un hymne à la liberté individuelle, à la tolérance et au pouvoir de la littérature.


Qu'en penser ?


Tout part d’une photo sur laquelle Delphine Minoui tombe alors qu’elle visite la page Facebook de « Humans of Syria ». Des jeunes, devant une bibliothèque, plongés dans des livres, éclairés par une lumière artificielle. La légende est claire et pourtant impensable : cette bibliothèque est située à Daraya, une ville assiégée de la banlieue de Damas. Impossible pour quiconque d’y rentrer ou d’en sortir. Les quelques 12 000 survivants qui y sont encore vivent sous les bombes, et pourtant, incroyable mais vrai, une bibliothèque s’y trouve.

En secret, ces jeunes rebelles vont fouiller les décombres pour sauver des milliers d’ouvrages. Chacun d’entre eux est une faille dans le conflit qui fait rage, un accès au savoir. Leur projet est fou : ouvrir une bibliothèque publique à Daraya. On peut penser qu’il est dérisoire de vouloir cacher des livres et les mettre en sécurité alors que la mort est partout et que survivre relève déjà de l’exploit. Et pourtant, ces livres sont un symbole de liberté, de connaissance, et bien plus encore … Ils permettent de continuer à se battre, pour que le patrimoine syrien subsiste, pour que chacun puisse apprendre le monde qui l’entoure, s’élever loin de cette barbarie.

Comment réussir à imaginer ce qu’est la guerre quand on ne la vit pas ? C’est l’injustice terrible de ce monde. Grâce aux réseaux sociaux, Delphine Minoui a réussi à pénétrer les murs fermés de Daraya, à échanger avec certains de ses habitants. Grâce à tout cela, elle a pu nous transmettre leur quotidien, leurs combats, leurs rêves et les réalités de la guerre qu’ils vivent à chaque seconde. Je lis très rarement des documentaires, mais celui-ci m’a bouleversé. On sait tous que la culture, la littérature, le savoir sont précieux, et pourtant, quelle plus belle preuve de son caractère indispensable à la survie humaine et à notre propre humanité que de lire cette extraordinaire histoire ?

Ces jeunes ont une telle envie de vivre, de combattre l’obscurantisme et la guerre qu’on leur impose, que leur rage de survivre dépasse les frontières. Delphine Minoui nous permet d’être au plus près de ces populations privées de tout et surtout de liberté. Ils survivent sans eau, sans nourriture, avec les bombes qui leur tombent sur la tête chaque jour, chaque minute. Des centaines d’enfants sont nés sous ces décombres, dans un état de malnutrition extrême, sans jamais voir la lumière de jour. Ce récit est tout simplement terrifiant, et pourtant indispensable.


L’auteure :
Delphine Minoui est grande reporter au Figaro, spécialiste du Moyen-Orient. Prix Albert Londres 2006 pour ses reportages en Iran et en Irak, elle sillonne le monde arabo-musulman depuis 20 ans. Après Téhéran, Beyrouth et Le Caire, elle vit aujourd'hui à Istanbul, où elle continue à suivre de près l'actualité syrienne. Elle est également l'auteur des Pintades à Téhéran (Jacob-Duvernet), de Moi, Nojoud, dix ans, divorcée (Michel Lafon), de Tripoliwood (Grasset) et de Je vous écris de Téhéran (Seuil).



 LES PASSEURS DE LIVRES DE DARAYA  -  Delphine MINOUI

SEUIL  -  19/09/2017
Format Poche  :  POINTS  -  04/10/2018



vendredi 3 mai 2019

L'EMPREINTE - Alexandria MARZANO-LESNEVICH



Présentation de l’éditeur :

Étudiante en droit à Harvard, Alexandria Marzano-Lesnevich est une farouche opposante à la peine de mort. Jusqu'au jour où son chemin croise celui d'un tueur emprisonné en Louisiane, Rick Langley, dont la confession l'épouvante et ébranle toutes ses convictions. Pour elle, cela ne fait aucun doute : cet homme doit être exécuté. Bouleversée par cette réaction viscérale, Alexandria ne va pas tarder à prendre conscience de son origine en découvrant un lien entre son passé, un secret de famille et cette terrible affaire qui réveille en elle des sentiments enfouis. Elle n'aura alors cesse d'enquêter inlassablement sur les raisons profondes qui ont conduit Langley à commettre ce crime épouvantable. 

Dans la lignée de séries documentaires comme Making a Murderer, ce récit au croisement du thriller, de l'autobiographie et du journalisme d'investigation, montre clairement combien la loi est quelque chose d'éminemment subjectif, la vérité étant toujours plus complexe et dérangeante que ce que l'on imagine. Aussi troublant que déchirant. 

Qu’en penser ?

Parmi les choses insoutenables que l’on refuse particulièrement de s’imposer dans un roman, il y a l’assassinat d’un enfant. C’est pourtant non seulement le point de départ, l’élément central, mais aussi la tentative d’achèvement de ce roman.
L’empreinte est un roman complexe, très particulier, inclassable. Un récit d’une humanité profonde, à la fois roman noir, enquête journalistique criminelle et autobiographie. Un titre qui sonne tellement juste, comme l’empreinte profonde qu’il laisse sur le lecteur, l’empreinte des blessures du passé sur nos vies.

En juin 2003, Alexandria Marzano-Lesnevich a 25 ans. Elle est étudiante en droit à Harvard et commence un stage dans un cabinet de défense de la peine de mort à La Nouvelle Orléans. Elle se retrouve face à une affaire qui va changer le cours de sa vie, celle du meurtre du petit Jeremy, 6 ans assassiné en Louisiane en 1992, par Rick Langley. Ce dernier est un prédateur sexuel récidiviste qui échappe à la chaise électrique.

Bien qu’étant opposée à la peine de mort, Marzano s’étonne de sa réaction viscérale. Au fond de ses tripes, elle souhaite la mort de Langley. La descente dans la psyché et les mécanismes du tueur d’enfants éveillent, chez elle, l’écho de sa propre histoire. Celle d’avoir été abusée sexuellement par son grand-père lorsqu’elle était enfant. Ce sont alors les fils narratifs qui s’entremêlent, deux investigations sur dix ans de réflexion. L’un, documentaire, l’autre, autobiographique. L’auteure entraîne le lecteur dans sa réflexion sur des sujets dérangeants. La culpabilité, l’inceste, la peine de mort, la vengeance, le pardon, la résilience, le poids du silence et ses conséquences, les blessures qui se transmettent de générations en générations, la complexité de l’amour, le sentiment d’appartenance, la trahison.

Un roman bouleversant, dérangeant, que l’on referme la gorge nouée.

"J’ai toujours cru que c’étaient les mots de Lorilei* qui avaient incité le jury à épargner la vie de Ricky. Mais la vérité est plus complexe : elle ne lui pardonne pas, mais elle ne veut pas sa mort."
(* Lorilei = mère du petit Jeremy)

"Tous les documents que j’ai consultés m’ont permis d’imaginer Ricky, d’imaginer sa famille, de commencer à éprouver une certaine empathie à son égard. Je ne peux pas ne pas savoir – je ne peux pas ne pas affronter – ce qu’il a fait."

"Je commence à comprendre que je ne crois pas au fond que le fait que je sois contre la peine de mort – ou celui que d’autres soient pour – puisse se ramener à la raison. Il s’agit toujours de la même conviction simple, fondamentale : celle que chaque individu est une personne, quoi qu’il ait pu faire, et que prendre une vie humaine est mal."




Alexandria Marzano-Lesnevich est la fille de deux avocats. À l’instar de ses parents, elle a fait des études de droit avant de s'en détourner pour des raisons qui nourrissent son oeuvre.
Alexandria Marzano-Lesnevich est l’autrice de L’Empreinte, salué par la critique, notamment par The Guardian. Amazon a désigné L’Empreinte comme un des meilleurs livres de 2017.
Ce premier récit littéraire lui vaut de remporter le prix du livre étranger JDD / France Inter 2019, le Chautauqua Prize ainsi que le Lambda Literary Award for Lesbian Memoir en 2018. Elle a également reçu un Rona Jaffe Award en 2010 (un prix qui récompense chaque année des autrices débutantes) ainsi que plusieurs bourses et résidences d'artistes. 
Passionnée par l’écriture et le journalisme, elle a contribué à des journaux prestigieux tels que The New York Times ou Oxford American. Alexandria Marzano-Lesnevich a collaboré avec d’autres autrices pour proposer une anthologie intitulée Waveform: Twenty-First-Century Essays by Women célébrant le rôle des femmes essayistes dans la littérature contemporaine.
Alexandria Marzano-Lesnevich vit à Portland dans le Maine et enseigne la littérature.




L'EMPREINTE  -  Alexandria MARZANO-LESNEVICH

SONATINE  -  10/01/2019

vendredi 26 avril 2019

TANGERINE - Christine MANGAN



Résumé :

Tanger, 1956. Alice Shipley n’y arrive pas.
Cette violence palpable, ces rues surpeuplées, cette chaleur constante  : à croire que la ville la rejette, lui veut du mal.
L’arrivée de son ancienne colocataire, Lucy, transforme son quotidien mortifère. Ses journées ne se résument plus à attendre le retour de son mari, John. Son amie lui donne la force d’affronter la ville, de sortir de son isolement.
Puis advient ce glissement, lent, insidieux. La joie des retrouvailles fait place à une sensation d’étouffement, à la certitude d’être observée. La bienveillance de Lucy, sa propre lucidité, tout semble soudain si fragile... surtout quand John disparaît.
Avec une Tanger envoûtante et sombre comme toile de fond, des personnages obsessionnels apprennent à leurs dépens la définition du mot 
doute.



Mon avis :

Nous sommes en 1956, à Tanger, où Alice Shipley vit avec son mari. Alice a pourtant bien du mal à se familiariser à cette ville grouillante et son atmosphère surchauffée. Pourtant c’est là qu’elle tente d’oublier un horrible incident, survenu en fin du cursus au Bennington College, et qui a changé le cours de sa vie. Mais une visite inattendue de Lucy Mason, sa camarade de chambre à l’université qui a été témoin de l’événement, risque bien de bouleverser cette quiétude. Face à son ancienne amie, Alice est en proie à une profonde incertitude. Peut-elle faire confiance à Lucy ? Celle-ci ne risque-t-elle pas de dévoiler la vérité ?

Les chapitres alternent les points de vue des deux principales protagonistes, qui évoquent chacune à tour de rôle leur passé, leur rencontre, et font allusion à ce fameux incident dont on ignore tout, si ce n’est qu’il est la cause de leur relation troublante et de l’atmosphère hitchcockienne du récit. Bien que le dialogue soit aigu et mordant, c’est le non-dit qui frappe le plus. La tension règne sous la surface et la vérité se cache entre les lignes.

Malheureusement, l’autrice joue aussi peu avec les tensions qu’un chat obèse avec sa souris. Le récit souffre d’apathie et les personnages manquent d’empathie.

La perspective narrative est tout aussi frustrante. Les chapitres alternent entre la perspective à la première personne d’Alice et de Lucy. Bien que les deux femmes soient très différentes – Alice calme et tremblante, Lucy rusée et indépendante – rien ne distingue leur voix narrative l’une de l’autre. A plusieurs reprises je me suis demandé qui était la narratrice du chapitre en cours de lecture.

Un bandeau accrocheur semble établir un parallèle entre Tangerine et les livres de Gillian Flynn. Pour moi la comparaison est tout simplement risible. Ce livre ne reflète en aucune manière la tension à bout de souffle et les intrigues habilement tissées trouvées dans les romans de Gillian Flynn.

Heureusement un certain élan est retrouvé dans le dernier quart du livre, pour mener les lecteurs à une conclusion qui séduira les uns et irritera les autres.




Christine Mangan est diplômée de l’University College de Dublin, où elle a rédigé une thèse sur la littérature gothique du xviiie siècle, et de l’Université du Sud du Maine, où elle a suivi un Master d’écriture. Tangerine est son premier roman.


TANGERINE  -  Christine MANGAN

HARPER COLLINS  -  02/05/2019