Après
avoir lu Silver Water
de Haylen
Beck, un excellent
thriller – que je vous
recommande - publié
chez Harper Collins en mars de cette année, j’ai eu
envie de découvrir un peu mieux cet auteur irlandais, dont le
véritable nom est Stuart
Neville.
Publié
en 2009 en version originale et en 2011 en français, Les fantômes
de Belfast nous emmène dans les rues de Belfast quelques mois après
la fin de la guerre civile qui mina l’Irlande du Nord trente
années durant. La trame de fond n’était pas simple, une guerre
civile que l’on a suivie de loin ( de très loin, même, sans
vraiment tout comprendre des tenants et aboutissants ), mais Stuart
Neville nous rend les choses merveilleusement simples. Le héros ( si
l’on peut qualifier ainsi un ex-tueur de l’IRA, qui se chargeait
des sales besognes et qui avait pas mal de sang sur les mains !), le
héros, donc, Gerry Fegan, à peine sorti de prison, est désoeuvré.
La paix étant enfin établie, Gerry Fegan — Gerry pour les intimes
— figure de proue des catholiques, admiré et — surtout ? —
craint de tous, passe ses soirées à picoler dans un pub. Son
obsession ? Les visions qui ne le lâchent pas, ses victimes,
véritables spectres que lui seul aperçoit et qui ne cessent de le
fixer, sauf après une certaine quantité d’alcool.
« Vengeance »
lui hurlent – ils à tue-tête. Le boucher et la femme avec son
bébé, fauchés par un attentat, les trois militaires et les deux
soldats des forces intérieures, tous massacrés, et les quatre
civils, qui s’étaient trouvés au mauvais endroit, au mauvais
moment. « Vengeance » lui réclament – ils, mimant du
geste le mouvement d’un pistolet. Vengeance, finit – il par se
persuader. Vengeance qui, seule, pourra mettre fin à ses
cauchemars. Trouver les responsables et les punir pour leurs actes,
c’est ce qui va animer Gerry Fegan tout au long de ce roman
habilement ficelé, un roman où l’amour n’a guère de
place, à l’exception de cette femme, Marie McKenna, et de sa
fille, Ellen, qui vont croiser sa route de manière inattendue.
Les
Fantômes de Belfast est un roman violent et sanglant où la violence
et l’effusion de sang servent réellement un but, plutôt que de
simplement essayer de choquer le lecteur. C’est une histoire de
vengeance, un thriller politique et un récit de rédemption.
Nous
observons ce monde principalement à travers les yeux de Fegan et
plus tard à travers ceux de Campbell, un ancien soldat britannique
devenu infiltré, qui sont tous deux aussi redondants dans ce monde
post-conflit. « S’il y a la paix, si c’est vraiment la fin,
alors à quoi allons-nous servir ? ». Comme dit l’auteur :
« Après quatre-vingts ans, ce petit pays avait enfin un
avenir. Mais Campbell non ».
A
l’exception de Fegan, pour lequel nous avons plutôt tendance à
éprouver de la sympathie, les portraits des chefs de l’IRA et de
ses soldats par l’auteur sont clairs et impitoyables, tandis que
les officiels britanniques sont plutôt caricaturaux.
La
morale du livre, exprimée par la mère d’un garçon assassiné,
est que tôt ou tard, tout le monde paie, même quand la paix est
déclarée et même quand les assassins deviennent des politiciens.
Bien
qu’il soit en quête de rédemption, Fegan reconnaît qu’il n’a
jamais imaginé un autre travail que tuer, mais se considère plus
comme un ouvrier qualifié que comme un artisan qualifié. Aussi,
pour lui, sa rédemption doit passer par l’élimination des
commanditaires. Dans ses descriptions Neville dépeint dans des
détails répugnants des scènes de torture et de meurtre infligées
par les responsables et leurs acolytes, alors que Fegan agit d’une
manière plus directe, plus propre, plus humaine. Qui dit repentir,
dit meurtre différent ?
Les
fantômes de Belfast, premier roman de Stuart Neville en 2009, est
original, captivant et plein de suspense. De quoi me donner l’envie
de poursuivre mon immersion irlandaise via sa bibliographie.
LES FANTÔMES DE BELFAST - Stuart NEVILLE
RIVAGES/NOIR (format poche) - 2/10/2013
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