Et
de jeunesse dorée, on en est loin dans ce roman de Cloé Mehdi qui
se passe dans un quartier déshérité d’une banlieue pourrie.
L’auteur peint une fresque sociale qui colle très bien à une
réalité facile à imaginer, tant elle nous fait penser à des
événements qui se sont déjà produits dans le passé, voire des
faits de violence quotidienne. Dans cette cité, un tag réapparaît,
en mémoire de Saïd, tué par la police quinze ans plus tôt.
Aujourd’hui encore, ses amis réclament justice.
"Je
connais son visage pour l’avoir si souvent vu tagué sur les murs
de ma ville, des Verrières aux belles rues de La Solaire, accompagné
de mots qui ne suffisaient pas – ne suffisent jamais – à dire
toute la colère, la haine et l’injustice de sa mort, des mots qui
appelaient à la vengeance et à ne pas oublier ni pardonner."
Les
personnages sont criant de vérité, à commencer par Mattia, ce
gosse malmené par la vie, qui en connaît les vicissitudes depuis
son plus jeune âge, un enfant avec un énorme manque d’amour,
retranché derrière sa muraille protectrice et préférant le
mutisme à l’échange social.
"Un
jour ma mère m’a dit qu’il fallait s’attacher à personne
parce que tout le monde finit par t’abandonner. C’est à ça que
ça devrait servir, les parents, te préparer à la dégueulasserie
du monde."
Zéphyr
Palaisot, alias Zé, est
son tuteur. Durant son
adolescence, il fut le témoin d’un accident lourd de conséquences
et s’enferma dans un carcan. La seule fois où il a voulu s’en
extraire lui a valu plusieurs mois d’hôpital psychiatrique. Zé,
c’est la révolte par les pages, par l’encre et par les mots,
Ses héros sont
écrivains :
Lamartine, Baudelaire, Camus, … Zé,
c’est le gars qui essaie juste de faire au mieux, pour lui, pour
ceux qu’il aime, pour survivre.
Gabrielle
est la compagne de Zé qu’il a rencontrée lors d’une tentative
de suicide ratée. Gabrielle, psychologiquement instable, sujette
aux idées suicidaires, semble vivre dans un désespoir
effroyablement calme.
Gina,
la sœur de Mattia, est comme lui une enfant du mutisme, rompue à
l’art d’analyser les différents silences. Ses disparitions
éperdues, permanentes
sont une manière de fuir les difficultés. Elle reste le seul lien
familial qui compte encore pour Mattia, lui
apportant durant leurs trop courtes retrouvailles un peu de rêve et
d’innocence, un peu de
ce lien familial dont il
a toujours manqué.
Et
puis, il y a ces deux types, plutôt sales gueules, qui observent les
allées et venues du gamin dès qu’il met le nez dehors. Alors
puisque personne ne dit à Mattia ce qui se passe vraiment, eh bien
il le découvrira tout seul. Car il a beau n’avoir que onze ans, sa
psy est formelle : côté maturité, il vaut largement un
adulte !
A
24 ans, Cloé Mehdi publie un sublime roman noir où
il est question de luttes et d’inégalités sociales. Son
style direct et son
écriture parfaitement maîtrisée au service de personnages
magnifiques justifient
aussi
les nombreux prix qui lui ont été attribués.
"C’est
ainsi que les choses fonctionnent, Mattia. La justice aux juges. La
violence aux flics. La santé aux médecins. Les fous aux asiles, et
ne t’avise pas de t’attribuer une place qui n’est pas la
tienne."
"L’erreur
est humaine n’est-ce pas, elle l’est si tu es un flic, elle ne
l’est pas si tu es un délinquant."
Un
sublime roman noir qui ne laisse pas indifférent !
TROPHÉE
813 DU MEILLEUR ROMAN FRANCOPHONE 2017
PRIX MILLE ET UNE FEUILLES NOIRES 2017
PRIX BLUES & POLAR 2017
PRIX MYSTÈRE DE LA CRITIQUE 2017
PRIX ÉTUDIANT DU POLAR 2016
PRIX DORA SUAREZ 2017
PRIX MILLE ET UNE FEUILLES NOIRES 2017
PRIX BLUES & POLAR 2017
PRIX MYSTÈRE DE LA CRITIQUE 2017
PRIX ÉTUDIANT DU POLAR 2016
PRIX DORA SUAREZ 2017
RIEN NE SE PERD - Cloé MEHDI
JIGAL POLAR - 05/2016
POCHE - 02/2017
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